ORGANE INTERNATIONAL DE CONTRÔLE DES STUPÉFIANTS - Rapport 2024 Dossier de presse

L’usage non médical de drogues synthétiques et les troubles liés à cet usage constituent désormais un problème meurtrier, qui entraîne des centaines de milliers de décès et cause d’innombrables dommages tant individuels que collectifs. Le chapitre thématique du Rapport annuel pour 2024 offre une analyse détaillée de l’évolution observée en matière de fabrication, de trafic et d’usage de drogues synthétiques ; il cerne les principales tendances et constantes du domaine et envisage les scénarios qui pourraient se jouer eu égard à la prolifération de ces drogues au niveau mondial.
L’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) aide les gouvernements à s’attaquer à ce défi en favorisant l’échange multilatéral volontaire d’informations et la coordination dans le cadre de son Programme mondial d’interception rapide des substances dangereuses (GRIDS) et du programme de contrôle des précurseurs. Dans le chapitre thématique, l’OICS signale les lacunes tant de la réglementation que des initiatives de réduction de l’offre et de la demande, et il formule des recommandations devant permettre d’apporter une réponse globale à ce grave problème de santé publique. L’OICS juge par ailleurs urgent d’intensifier les efforts déployés en matière de prévention, de traitement, de réadaptation, de réduction des risques, de rétablissement et de réinsertion sociale afin de protéger la population contre ces substances extrêmement dangereuses.
Les données communiquées à l’OICS en application des traités confirment une fois de plus la persistance d’inégalités en termes de disponibilité des médicaments soumis au contrôle international et destinés à la gestion de la douleur, à l’anesthésie, au traitement des problèmes neurologiques et mentaux et à la prise en charge des troubles liés à l’usage d’opioïdes. Au niveau mondial, l’offre de matières premières opiacées excède les besoins nationaux dont les gouvernements ont fait part à l’OICS, mais il se peut que, dans certains pays, les chiffres communiqués ne reflètent pas fidèlement les besoins médicaux effectifs. Grâce notamment à son programme « INCB Learning », l’OICS aide les pays à renforcer l’application des trois traités internationaux relatifs au contrôle des drogues en vue d’améliorer la disponibilité à des fins médicales, scientifiques et industrielles des substances placées sous contrôle et l’accès à des services de prévention et de traitement fondés sur des données factuelles et exempts de toute stigmatisation, tout en empêchant les détournements vers les circuits illicites et le mésusage. En 2024, j’ai eu le plaisir de signer un protocole d’accord avec l’International Association for Hospice and Palliative Care visant à améliorer la disponibilité des substances placées sous contrôle par la mise en commun de résultats de recherches, de données et d’analyses.
Il est capital de noter que la nécessité de garantir l’accès et la disponibilité des substances s’étend également aux urgences humanitaires — qu’elles découlent de catastrophes naturelles, de conflits armés ou d’autres causes d’origine anthropique — dans lesquelles les patientes et patients doivent pouvoir accéder aux médicaments placés sous contrôle et aux services de traitement indispensables. L’OICS rappelle aux États concernés et aux pays exportateurs qu’il est possible d’appliquer des mesures de contrôle simplifiées dans les situations d’urgence, comme le prévoient les conventions.
Garantir à tous et à toutes, en tous lieux et à tout moment, l’accès aux médicaments placés sous contrôle international et au traitement des troubles liés à l’usage de drogues est un élément du droit à la santé. Le respect des droits humains est une condition préalable à la bonne application des conventions relatives au contrôle des drogues, dont il fait partie intégrante. L’OICS a demandé à plusieurs reprises que les droits humains soient pris en compte lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques en matière de drogues. Toute mesure qui est adoptée dans le but affiché de faire progresser ces politiques mais qui est incompatible avec les normes universellement reconnues en matière de droits humains constitue une violation des conventions internationales relatives au contrôle des drogues.
Les obligations liées aux droits humains comprennent aussi la promotion de l’égalité et de la non-discrimination à l’égard des personnes qui font usage de drogues, l’interdiction des arrestations et des placements en détention arbitraires, le droit à un procès équitable en cas d’infraction liée à la drogue, l’application du principe de proportionnalité et la protection contre toutes les formes de peines cruelles et inhumaines. L’OICS rappelle de nouveau aux États que les conventions leur permettent d’appliquer des mesures de substitution à la condamnation, à la sanction et à l’incarcération, y compris des mesures d’éducation, de réadaptation et de réinsertion sociale.
Le Système de notification des incidents du Projet « Ion » (IONICS), qui a eu 10 ans en 2024, a facilité l’échange d’informations concernant 100 000 incidents liés au trafic de drogues synthétiques. Il a permis aux autorités de mettre en commun des informations essentielles sur les incidents liés aux nouvelles substances psychoactives, y compris les opioïdes synthétiques non médicaux très puissants, ce qui a assuré le succès de nombreuses opérations — dont les récentes opérations « Zodiac » et « African Star », coordonnées par le Centre de cybercommunication du Programme GRIDS (GC3) de l’OICS, à Vienne. Ces opérations ont désorganisé les chaînes d’approvisionnement illicites, réduisant ainsi la quantité de substances disponible sur les marchés illicites partout dans le monde. L’année 2024 a également été marquée par l’adoption, par la Commission des stupéfiants, de la recommandation de l’OICS tendant à ce que deux précurseurs du fentanyl et 16 précurseurs de stimulants de type amphétamine soient placés sous contrôle international.
L’OICS s’est par ailleurs félicité de la finalisation et de l’adoption, en 2024, d’une nouvelle convention des Nations Unies sur la cybercriminalité, dont il attend avec intérêt la ratification et l’application, en particulier dans le contexte de la lutte contre l’exploitation des technologies reposant sur Internet aux fins du trafic de drogues.