Invitation à devenir des alliés dans la prévention et l'élimination de la violence à l'égard des femmes et des filles à Madagascar
En 1995, les pays du monde entier ont fait une promesse dans la Déclaration et le
programme d'action de Beijing.
En 1995, les pays du monde entier ont fait une promesse dans la Déclaration et le programme d'action de Beijing, celle de prévenir et d’éliminer la violence à l'égard des femmes et des filles.
Près de 30 ans plus tard, la violence basée sur le genre reste la violation des droits humains la plus prévalente et la plus répandue dans le monde. Mais elle est insuffisamment étudiée, et perpétuée par un cycle d’impunité pour les agresseurs. Cette situation favorise un climat de peur et de stigmatisation qui entrave le rétablissement des victimes et prive celles-ci de leur droit d’accès à la justice et au soutien. Comme l’a bien dit la Vice-secrétaire générale des Nations Unies, Amina Mohamed : « La violence à l'égard des femmes et des filles est un phénomène omniprésent dans le monde entier. Son ampleur nous a conduit à en normaliser son existence. Mais les abus et la violence ne sont jamais normaux ».
Chaque année, le 25 novembre nous commémorons la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes et des filles et le début de la campagne « 16 jours d'activisme contre la violence basée sur le genre ». Le thème de la campagne mondiale de cette année est « Vers le 30e anniversaire de la Déclaration et du programme d’action de Beijing : TOUS UNiS pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles ». Son objectif est de mobiliser tous les acteurs - le secteur public, le secteur privé, la société civile, les médias, le monde universitaire, les leaders religieux et communautaires, les influenceurs d’opinion, les partenaires du développement, entre autres - pour prévenir et éliminer ce fléau.
La violence basée sur le genre ne connaît ni frontières économiques, ni sociales, ni politiques. Elle se manifeste dans toutes les sphères - familiale, communautaire et national - sans aucune discrimination. Elle se retrouve malheureusement dans toutes les cultures, toutes les classes sociales et tous les pays, et Madagascar ne fait pas exception à la règle. On estime que plus d'un tiers des femmes et des filles âgées de 15 à 49 ans dans la Grande île subissent des violences physiques, sexuelles ou psychologiques de la part de leur mari, de leur partenaire ou de quelqu'un d'autre. Ces données sont d'autant plus effrayantes que trois hommes sur dix et quatre femmes sur dix pensent qu'il est acceptable qu'un homme puisse battre sa femme. Mais en même temps, seulement 15% des femmes et des filles survivantes de violence ont accès à des services de prise en charge. Madagascar est également l'un des vingt pays au monde où le taux de mariage des enfants est le plus élevé, avec 39 % des femmes âgées de 25 à 49 ans déjà en union avant l'âge de 18 ans – 12 % avant l'âge de 15 ans.
Les conséquences de cette violence se font sentir à court et à long terme pour les femmes et les filles, mais aussi pour la société dans son ensemble. En plus de son impact direct sur la vie ou la santé physique, mentale, sexuelle et reproductive des femmes et des filles, elle porte atteinte à la dignité, à la sécurité et à l'autonomie des survivantes, affectant leur participation à l'éducation, au marché du travail et à la vie publique et politique. Elle entrave ainsi la contribution que les femmes et les filles pourraient apporter au développement du pays. L'impunité dont jouissent les auteurs de ces actes et la peur qu'ils suscitent accentuent ces effets. Au niveau mondial, on
estime que la violence à l'égard des femmes et des filles coûte au moins 2 % du produit intérieur brut. L'élimination des violences est donc une condition préalable non seulement à la réalisation de l'égalité des sexes, mais aussi au développement durable.
Des progrès significatifs ont été réalisés au cours des dernières années. À Madagascar, nous avons assisté à l'adoption de stratégies et de mesures juridiques pour lutter contre les inégalités et les violences basées sur le genre, en particulier dans les domaines du mariage, y compris le mariage des enfants, de la traite des êtres humains et du tourisme sexuel. Nous avons également assisté au renforcement des capacités institutionnelles et à la fourniture de services de prise en charge pour les survivantes.
Malgré ces avancées, des défis majeurs restent à relever. Les faibles taux de signalement et de dénonciation, aggravés par l'impunité, signifient que seule une très faible proportion des infractions aboutit à des procès et à des condamnations des auteurs. L'accès à des services de prise en charge de qualité reste limité et inégal. Les efforts de prévention sont entravés par des normes socioculturelles discriminatoires profondément enracinées, ainsi que par la dépendance économique des femmes à l'égard des hommes, en raison de leur accès réduit aux opportunités et ressources économiques. La vulnérabilité élevée des femmes et des filles aux chocs de plus en plus fréquents liés au changement climatique, tels que les sécheresses et les cyclones, aggrave leur situation.
Cependant, aucune femme ou fille ne devrait mourir ou subir des violences au cours de sa vie simplement parce qu'elle est une femme ou une fille. La bonne nouvelle, c'est que différentes initiatives menées dans de nombreux pays ont montré qu'il est possible de prévenir la violence basée sur le genre. Grâce aux enseignements tirés de ces expériences, nous savons désormais que les approches les plus efficaces sont les approches holistiques qui s'attaquent aux causes profondes de la violence, impliquent l'ensemble du gouvernement et de la société, sont centrée sur la personne mais adaptée au contexte local, renforcent les organisations de défense des droits des femmes, et s'appuient sur une volonté politique forte et des ressources appropriées.
C'est pourquoi, en ce jour, j'invite tout le monde à unir ses forces et à devenir des alliés dans la prévention et l'élimination de la violence à l'égard des femmes et des filles à Madagascar. Chaque effort investi dans l'élimination de ce fléau est un pas vers un monde plus sûr, plus égalitaire et plus prospère.
TOUS UNiS pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles !